Tout savoir sur le moustique tigre

La France compte naturellement une cinquantaine d'espèces indigènes de moustiques de la famille des Culicidae. C'est déjà pas mal ! Mais il faut croire que ça ne nous suffisait pas... Car la problématique du moustique tigre est une énième manifestation joyeuse de la mondialisation, les bons effets des voyages et des échanges commerciaux inconsidérés... ARTHROPOLOGIA vous propose un petit point sur cet insecte et sur les gestes à adopter !

Comment reconnaître un moustique tigre ?

L’adulte

Malgré sa mauvaise réputation, le moustique tigre est une élégante espèce dans sa tenue bariolée. Cette espèce est très facile à reconnaître au premier coup d'œil, si on prend quelques secondes pour le regarder.

Elle est d'abord plus petite que nos moustiques indigènes, mais elle est surtout très clairement maculée de taches blanches, veloutées.

 le moustique tigre est une élégante espèce dans sa tenue bariolée.
Un moustique tigre (Aedes albopictus) entamant son repas de sang © James Gathany

La larve

Nos larves de moustiques indigènes sont généralement grisâtres, tandis que les larves de moustique tigre sont bien plus claires (blanc crème) et présente un appendice sombre au bout de l'abdomen.

Le cycle de vie du moustique tigre

Cycle de vie d'un moustique du genre <em>Culex</em> - © Mariana Ruiz Villarreal
Cycle de vie d'un moustique du genre Culex - © Mariana Ruiz Villarreal

Après l'accouplement la femelle du moustique tigre doit prélever du sang chez les vertébrés pour faire maturer ses œufs. Puis elle les dépose, groupés en minuscules barques, à la surface des petits points d'eau stagnante de toute sorte : cavités végétales (creux de branche, tronc, feuilles...), vasques, ornières...

Une fois écloses, les larves se développent dans l'eau en mangeant les micro-algues et autres débris organiques.

Ces moustiques utilisent ainsi une toute petite niche écologique, peu ou pas exploitable par la majorité des autres espèces à développement aquatique.

Acclimatation des espèces exotiques

Autrefois les espèces tropicales dont fait partie le moustique tigre, n’arrivait pas à survivre à nos hivers. Mais avec l’évolution du climat, les hivers sont de plus en plus favorables aux espèces sensibles au froid et permettent à ces derniers de survivre, en particulier dans les milieux urbanisés.

Il y a 2 à 3 degrés de différence entre un centre-ville très minéralisé (goudron, béton, dalles...) et la campagne environnante.

En été et particulièrement lors des épisodes de canicules, les écarts de température peuvent atteindre 8-10 °C et parfois plus. C'est ce qu'on appelle les îlots de chaleur. Ces conditions sont encore favorables au développement des espèces exotiques alors plus compétitives dans ces conditions extrêmes.

Présence du moustique tigre en France

Le site de signalement du moustique tigre, géré par l'ANSES* vous permet de voir si votre commune est "touchée" par le moustique tigre.

ANSES : Agence Nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail

Voir la carte https://signalement-moustique.anses.fr/signalement_albopictus/colonisees

Le point sur quelques idées reçues

Mare = moustiques ?

Mare = moustiques ?

Les points d'eau remplis de vie (mares, étangs...) ne laissent que peu de chance au développement des moustiques. Ces milieux hébergent au contraire nombre de prédateurs (aquatiques et aériens) qui peuvent endiguer la prolifération des moustiques : crustacés, larves d'éphémères, libellules et demoiselles, punaises et coléoptères aquatiques, poissons et amphibiens...

Mais dans un bidon ou tout autre récipient placé au soleil, il en va bien autrement : lorsque la température de l'eau augmente, l'oxygène dissout diminue en conséquence. Ainsi, les animaux aquatiques munis de branchies ne peuvent s'y installer et doivent déménager ou mourir.

Les moustiques quant à eux sont capables de respirer l'air atmosphérique directement à la surface, grâce à schnorkel (sorte de tuba). Ce sont donc les récipients d'eau (même petits) laissés au soleil qui permettent aux moustiques de se développer rapidement et sans limites.

Une simple canette de 33 cl peut ainsi libérer des centaines, voire des milliers de moustiques en une année !

Pots et sous-pots non vidés
Pots et sous-pots non vidés

Arrosoirs coupelle d'eau pour fleurs mortes ou … en plastique
Arrosoirs coupelle d'eau pour fleurs mortes ou … en plastique

Arrosoirs cou

(Photos de berceaux à moustiques : JY Barbier, AGUPE, Sainte-Foy-lès-Lyon)

Mesures anti-moustiques

Mesures préventives, prophylactiques

Rappel : les petits volumes d'eau stagnante sont la principale source de développement larvaire. Il est donc important de ne pas laisser de zones permettant la ponte et surtout le développement des larves :

  • Rechercher et vider régulièrement tous les réservoirs artificiels d'eau, même temporaires (le cycle de développement des moustiques ne dure que quelques jours en été) : bidons coupelles, vasques, jouets, abreuvoirs, mais aussi les pneus, bâches plastique... Si les réserves sont utiles : couvrir alors les récipients avec une moustiquaire ou un tissu.
  • Les coupelles de réserve d'eau ou encore les ornières argileuses retenant l'eau, peuvent être remplies de sable ou de terre.
  • Vérifier et déboucher ou vider si besoin les chêneaux, gouttières, regards et autres conduits où l'eau peut être retenue.
  • Arroser le moins possible et uniquement au pied de la plante, ne surtout pas utiliser d'asperseur pour ne pas remplir d'éventuels contenants.

Astuce contre les piqueurs : un ventilateur perturbe la détection olfactive et gêne considérablement le vol de ce minuscule insecte. Ça peut être pratique pour manger tranquillement !

Mesures écosystémiques

Il est également primordial de développer le "système naturel de contrôle" des moustiques adultes en plus des mesures préventives que vous pouvez prendre :

  • Développer la diversité et l'abondance des prédateurs dans et autour de votre maison : favoriser la mosaïque de milieux et ainsi l'installation d'habitas variés et de micro-habitats favorables à la petite faune sauvage, essentiellement prédatrice.

Quelques exemples :

Araignée <em>Steatoda</em> sp. capturant un moustique dans une maison.
Araignée Steatoda sp. capturant un moustique dans une maison.

Les oiseaux insectivores, comme ici la mésange bleue, peuvent consommer des moustiques, les champions étant les hirondelles et les martinets.
Les oiseaux insectivores, comme ici la mésange bleue, peuvent consommer des moustiques, les champions étant les hirondelles et les martinets.

Les chauves-souris, en fonction des espèces, peuvent manger plusieurs centaines à plusieurs milliers de moustiques en une nuit !
Les chauves-souris, en fonction des espèces, peuvent manger plusieurs centaines à plusieurs milliers de moustiques en une nuit !

La Scutigère véloce, est capable de courir à plus de 40 cm par secondes ! C'est également un des prédateurs domestiques des moustiques, des punaises des lits...
La Scutigère véloce, est capable de courir à plus de 40 cm par secondes ! C'est également un des prédateurs domestiques des moustiques, des punaises des lits...

Mesures curatives

En cas de forte prolifération, vous pouvez vous protéger en portant des vêtements longs, en installant des moustiquaires (fenêtres, lit...). Certaines huiles essentielles peuvent être dissuasives pour les moustiques, d'autres calment les démangeaisons.

Attention, les huiles essentielles peuvent être dangereuses, prenez obligatoirement conseil auprès d'un spécialiste.

Mesures de fond à mettre en œuvre à long terme

D'où viennent ces moustiques ? Et comment arrivent-ils ?

Les espèces exotiques qui s'avèrent envahissantes n'arrivent jamais toutes seules, ni par hasard. De nombreux organismes sont importés pour des raisons esthétiques (horticulture, aquariophilie, NAC...).

Mais les échanges commerciaux plus conventionnels transportent également (involontairement cette fois) toutes sortes d'organismes au travers de la planète.

On compte déjà plusieurs dizaines de milliers d'espèces déplacées par les humains sur l'ensemble du globe. Ainsi une fois bien installée, il est alors très compliqué, couteux et souvent long et polluant de tenter d'éradiquer une espèce. D'autant plus que cela fonctionne rarement.

Comme c'est le cas pour de nombreuses autres espèces exotiques, il n'est sans doute plus possible et totalement inconscient de vouloir éradiquer le moustique tigre de France. L'espèce est aujourd'hui bien installée en Europe du sud et désormais dans une bonne partie de la France.

A noter que le moustique tigre est installé depuis plus de 30 ans en Amérique du nord.

Il va donc falloir vivre ("ou apprendre à vivre") avec. Continuer d'intoxiquer régulièrement et crescendo les milieux urbanisés avec des pulvérisations de pesticides n'est décidément pas une solution durable, ni pour la biodiversité, ni pour l'humanité.

Face à ce genre de problème, seules les solutions fondées sur la nature, qui copient ou favorisent des processus naturels sont durables, acceptables et réaliste. Ainsi la seule voie est de rétablir au mieux un fonctionnement naturel, dans lequel la diversité et l'abondance des prédateurs naturels permettra de juguler ce genre de prolifération.